Le parlement a décidé au début de l’été de renforcer le déploiement des maisons de naissance, pour la plus grande satisfaction des sages-femmes engagées dans ce type de projet. Une décision qui est loin pourtant de faire l’unanimité !
Maisons de naissance ou maisons de sages-femmes, une reconnaissance officialisée ?
On a déjà évoqué l’essor des demandes d’accouchements moins médicalisées de la part des femmes, et cette tendance s’est accentuée, dans une proportion qu’il est encore difficile d’évaluer, avec la crise sanitaire. On ne reviendra pas sur les querelles pouvant opposer certaines sages-femmes à d’autres soignants, concernant l’accouchement à domicile. En revanche, les maisons de naissance, elles, ont été reconnues comme une voie d’avenir par les parlementaires. Non seulement, ils ont validé l’expérimentation (depuis 5 ans) des 8 maisons de naissance existantes, mais ils ont décidé d’accélérer le déploiement de ces lieux consacrés à l’accompagnement de la grossesse. En effet, douze nouvelles maisons de naissance devraient voir le jour avant la fin de 2022, et les sages-femmes ne peuvent que se féliciter de la multiplication de ces lieux, où elles seules interviennent et accompagnent les futures mamans.
Cette envie d’un « retour au naturel », qui traverse la société, ne sera toutefois pas entièrement comblé tant le déficit de moyens est criant. En 2019, ce sont ainsi 500 accouchements, qui ont été suivis dans ces maisons de naissance, 500 sur 753.000 naissances recensées pour cette même année. En doulant les capacités d’accueil, les maisons de naissance ne pourront pas satisfaire à toutes les demandes, d’autant plus que selon les chiffres de l’Assurance Maladie, la même année 2019 aura vu se dérouler 1.000 accouchements à domicile. Toujours est-il, que l’une des revendications des sages-femmes libérales semble (enfin) avoir été entendue.
Les sages-femmes contre les obstétriciens, un rapport de force difficile à comprendre
Pour une partie des sages-femmes libérales, la création de nouvelles maisons de naissance marque non seulement une reconnaissance de leur mission et de leur rôle, mais aussi une réponse apportée aux aspirations d’une partie des femmes d’aujourd’hui. Mais cette décision ne fait pas l’unanimité bien au contraire. Interrogée par les journalistes de 20 Minutes, la vice-présidente du Collège National des Gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), Mme Alexandra Benachi, s’est même interrogée : « J’ai lu que 20 % de ces patientes sont finalement transférées dans des maternités. C’est beaucoup ! ». Au-delà de ces phrases polémiques, cette opposition met à mal la position des sages-femmes engagées dans ces projets, qui se multiplient sur tout le territoire. Des sages-femmes, qui se plaisent à rappeler que les maisons de naissance n’ont pas vocation à prendre en charge des grossesses à risques, et qui soulignent, que le législateur a maintenu l’obligation d’implanter ces lieux à proximité immédiate d’un établissement hospitalier.
Toujours est-il que le lobbying contre le développement de cette autre conception de la maternité a d’ores et déjà commencé, et que les sages-femmes vont devoir hausser le ton pour pouvoir faire entendre leurs arguments. Certains gynécologues soulignent déjà, que ces maisons de naissance pourraient être transformées en aménageant des locaux spécifiques à l’intérieur même des maternités. Une solution, qui annihilerait l’esprit même de ces lieux, puisque pensés pour représenter une alternative à l’accouchement médicalisé. Le collectif Maisons de Naissance déplore cette attitude de la part de certains soignants et le condamne : « On voit, dans cette opposition aux maisons de naissance, une forme de corporatisme chez les gynécos ». Et pour les gynécologues et obstétriciens, la multiplication des maisons de naissance va nécessairement attirer de nouvelles sages-femmes, alors même que ces maïeuticiennes ne sont déjà pas assez nombreuses dans les maternités. L’argument est balayé par les sages-femmes, qui contestent que la création de 12 nouvelles maisons de naissance pourrait être à l’origine d’une pénurie de sage-femme hospitalière.
C’est donc un combat long, qui s’est engagé entre les sages-femmes et les femmes désireuses de pouvoir concrétiser leurs envies d’un côté, et les gynécologues, obstétriciens et plus généralement un système hospitalier cherchant à défendre son modèle d’autre part. Un combat difficilement compréhensible à une époque, ou l’exercice coordonné est présenté comme l’avenir de notre système de santé. Une relation de confiance entre les sages-femmes et les gynécologues, qu’il devient urgent de restaurer et de renforcer.
Et vous, que pensez-vous de ce développement des maisons de naissance ? Et de cette opposition avec les gynécologues obstétriciens ?